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The get down

La Street School

Marion Motin, c'est la chorégraphe de Christine and The Queens et de Stromae. Elle est même partie en tournée avec Madonna. Aujourd'hui, elle a un crew, les Swaggers. Son école à elle ? Celle de la rue, du hip hop et de la différence. Portrait d'une nana cool, avec le rythme dans les veines et la passion dans les tripes.

Marion Motin

Chorégraphe
Comment tu as rencontré le hip hop ?

Quand j'étais petite, je faisais de la danse classique. Mais il y a avait trop de normes. Par exemple, il fallait un physique particulier, moi, j'étais trop ronde. Et puis, il n'y avait aucune place à la personnalité... On était dans l'exécution parfaite du mouvement. C'était pas mon truc. Dans le hip hop, t'as pas besoin de correspondre à quelque chose, tu es ce que tu es. Point. C'est instinctif. C'est vraiment l'essence du hip hop. Ta différence, c'est ta force.

Justement, tu travailles avec des artistes très différents. Comment tu t'adaptes à chaque personnalité et à chaque style ?

C'est assez instinctif. Quand je rencontre quelqu'un, si y'a un feeling, je me nourris tout de suite de leur univers. Je ne suis pas là pour imposer un style “Marion Motin”, je suis juste à leur service. Je m'imprègne de ce qu'ils sont et où ils veulent aller, j'écoute leur musique… Évidemment, y'a de moi dans leur choré car c'est ma gestuelle et mon corps. Mais c'est moi au service de leur univers à eux. C'est comme si je me mettais dans leurs corps. Ce qui me fait vibrer, c'est de les voir s'épanouir et faire des choses dont ils ne se sentaient pas capables. Je les aide à être l'essence de ce qu'ils sont.

« Mon inspiration est partout sauf dans la danse »

Dans la série, les jeunes forment un vrai crew, qui se sert les coudes. Toi aussi t'as ta team ?

Oui, on s'appelle Swaggers. Une des valeurs fondamentales du hip hop, c'est la transmission. Quand tu commences à te faire un nom, à fédérer un public, à imposer ton style, c'est le bon moment pour transmettre. À la base, j'ai regroupé des nanas qui avaient une personnalité, et je devais juste les entraîner. Et finalement, y'a eu un tel feeling entre nous que je suis à fond avec elles.

On a un spectacle qui s'appelle In The Middle, et aujourd'hui, des filles de mon groupe veulent devenir elles aussi chorégraphes. C'est ça qui est plaisant, voir les gens autour de toi grandir et s'épanouir. L'esprit d'équipe est aussi hyper important : quand on va toutes à un battle, on est un crew. On se soutient toutes. C'est comme des gangs, sauf qu'on se bat en dansant. Et quand t'es dans l'arène, t'as ta meute derrière toi.

À quel moment de ta vie tu t'es dit « ah oui, là, j'en impose carrément » ?

Dans ma vie de danseuse, sans hésiter, à deux moments. Le premier c'est quand j'ai travaillé avec Angelin Preljocalj. C'est un très grand chorégraphe contemporain. Il avait proposé les auditions à toutes mes copines, sauf à moi. J'y suis allée quand même, et ils m'ont pris. Comme quoi, être à la bonne place, au bon moment, ça paye.

Et évidemment, quand j'ai dansé pour Madonna. C'était dingue ! T'imagines, le directeur artistique de Madonna t'appelle et te demande si tu peux venir à New York pour une audition privée. Là clairement, tu te dis « Ok Marion, t'as un peu percé quand même ».

Make your mark

Le tuto pour danser comme Christine and the Queens
Qu'est-ce qui te donne la force de toujours continuer à danser ?

Ce qui me donne la force de toujours recommencer c'est la vie. À la fin d'une création, t'es plus dans le concret. C'est un processus lourd de créer. Tu es toujours dans la projection, tout va très vite… Quand c'est fini, tu te poses, tu te ressources, tu regardes le monde qui t'entoure et tu te dis “c'est trop bien, je vais faire une créa là-dessus”. Par exemple, l'autre soir, j'étais à un dîner. Je me suis retrouvée avec une énorme araignée noire sur le bras, alors que je suis phobique des araignées. Pendant une heure je faisais des gestes hyper saccadés, comme des mouvements de dégoût incontrôlables. Et avec mon mec on s'est dit qu'on allait créer un truc sur les phobies. Parfois, tu te retrouves dans des situations complètement lambdas de vie, et ça te donne l'impulsion de créer. Dès que tu es dans la vie, tu es inspirée pour ton art.

« Le hip-hop c'est le besoin de danser, d'écouter de la musique et surtout de faire autrement »

Et la série The Get Down, tu en as pensé quoi ?

Honnêtement après le 1er épisode, je trouvais que certaines choses ne collaient pas avec la réalité. J'étais un peu sceptique. Et au bout d'un moment j'ai compris : ça allait plus loin que la réalité. Après j'étais à fond dedans ! J'ai trop kiffé. On retrouve vraiment l'histoire, la vraie, qui s'insère dans un scénario. J'ai plein de potes qui me racontaient les soirées dj de l'époque, ça m'a fait marrer de retrouver tout ça dans la série.

La photo de couverture de Marion

« Dans le hip hop, t'as pas besoin de correspondre à quelque chose, tu es ce que tu es »

Y'a t'il des passages qui t'ont particulièrement marqués ?

La conversation entre Shao et Grandmaster Flash. Il lui explique de pas faire comme lui, qu'il doit trouver son truc vraiment à lui. C'est vraiment symbolique comme message.

Il y a aussi ce moment où ils créent leur show et qu'ils passent tous au milieu. Ils rappent, ils dansent... Je me souviens d'avoir fait ça des milliards de fois.

Qu'as-tu préféré dans cette série ?

Ce qui m'a le plus fait kiffer c'est vraiment les soirées des djs. Tout le travail de Shao pour devenir dj. Les explications qu'il reçoit et les choses qu'il comprend c'est des choses que j'ai senti dans la danse aussi. Ça m'a fait rire car je parle aussi de super-pouvoir, comme lui. En fait, la série m'a renouée avec les bases du hip hop. On a chacun son truc à défendre. C'est pour ce truc-là que je fais du hip hop. C'est vraiment ce que je défends. C'est une piqûre de rappel sur ce qu'est le hip hop à la base.

Quel est le personnage qui t'a le plus plu ?

J'aime beaucoup le rôle principal. Il essaye de faire les choses justes et d'être raccord avec lui même. C'est une sorte d'identification. Ça me touche beaucoup. En termes de comédie de rôle, le personnage de Cadillac est hyper cool. Aussi, j'ai bien aimé la petite histoire avec Jaden et l'autre graffeur. Ils se passent quelque chose entre eux, c'est cool de soulever le tabou de l'homosexualité dans le hip hop. C'est fort.

The Get Down

Bronx. Années 1970. Pauvreté, crise et violence. une bande d'ados perdus, sans avenir s'attache à ce qu'il lui reste dans la vie : la musique, la danse et le rythme. Découvrez comment d'un sous-sol oublié, le hip hop est devenu une vraie culture cool. Promis, The Get Down, c'est une série avec du shake ton booty dedans.

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