Ça commence mal pour Philippe Mountbatten. Il pensait épouser une femme. Il se retrouve au bras d’une Reine. Et affublé du galon falot de « Prince Consort » - prince qu’on sort, un peu comme un corgi en laisse.
Devoir s’agenouiller aux pieds de son épouse sous des millions de regards pour lui faire allégeance. Sortir toujours après elle, afin que les photographes ne flashent que sa Majesté, pas les simples mortels. De quoi vous broyer un ego en moins de deux. Pourtant, ça fait 65 ans que ça dure. Comment Elisabeth a-t-elle négocié pour que son homme tienne si longtemps dans l’ombre ?
Bien sûr, il y a les petits arrangements pour faire passer la pilule. Saisir la moindre occasion de le valoriser. Le laisser vous inviter au resto même si vous gagnez 2 fois plus que lui, ou aménager le budget pour qu’il ait l’impression d’assumer les postes vitaux façon chasseur de mammouth, dixit les psy spécialistes de la question.
Le vrai problème, et la vraie solution pour vivre sans frustration les différences sociales dans le couple, se jouent bien en amont : dans l’éducation, qui cultive encore les stéréotypes de genre. L’écrivaine nigériane star Chimamanda Adichie met magistralement le doigt dessus dans sa conférence Ted à 2M de vues : « On dit aux filles Tu peux avoir de l’ambition mais pas trop, pour ne pas menacer les hommes. Et les garçons se retrouvent sous pression d’endosser une virilité hard qui masque leurs vraies aspirations. ». Idem dans le mariage, qui alimente la pression sur les hommes par un vocabulaire de la possession, pas du partenariat (le typique “je te prends pour épouse”). Impériale, Chimamanda nous donne ses tips quotidiens pour rectifier le tir à long terme : côté éducation, insister systématiquement sur les capacités réelles et personnelles de l’enfant que ce soit à l’école ou à la maison, jamais sur le genre ; quand on sort à deux, ne pas en laisser passer une (si le serveur remercie monsieur du pourboire alors que c’est vous qui l’avez laissé, le faire remarquer ; et vice versa) ; dans le couple, choisir soigneusement ses mots, pour instaurer une culture du partenariat plutôt que de la possession ou du compromis. Son féminisme pragmatique et radieux libère autant les femmes de leurs rôles que les hommes. Philippe adorerait, for sure.